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Un jour de novembre 2006

2 juillet 2008

Que faire d’un bar comme celui-ci dans une fiction ? Nulle personne saine ne passerait plus de temps que ça ici.

Un bar branché, c’est tout. Normalement, ça n’a d’intérêt que ponctuellement, on y fait se dérouler une scène particulière, une rencontre, une dispute, des abus alcooliques, pour donner le ton d’une relation, brosser un grossier portrait ou plonger le lecteur dans une atmosphère comme on le plongerait dans un aquarium.

Rien (ou peu) du quotidien de chacun ne se révèle ici. Ce n’est qu’un passage, un lieu de récréation et de recréation éphémère de soi. Rien de plus. Un lieu occasionnel de dragues inabouties. Pas même un lieu de débauche, ou de beuverie. Quelque chose de commun dans lequel les événements n’ont rien que de très banals dans leurs genres. Peut-être y en a-t-il plus ici qu’ailleurs, et encore.

Tranches de vie, clichés de vie, petites vies, petites histoires, petits destins. Extrapolation de l’instant, variations sur un personnage.

Ce que j’aimerais, c’est que ces fragments de texte, ces instantanés de bar soient un point de départ, ou au moins la suggestion de la possibilité d’une histoire, d’un tout entr’aperçu là, d’une infime part d’infinité volée — c’est toujours ça de pris — ; on sort la personne de son contexte, on la met dans une boite qui conviendrait à tous, on voit ce qu’il fait pendant le temps bref (relativement à sa vie entière) qu’il y passe. Mais bon, faut pas non plus prendre ses rêves pour des réalités.

Souvent comme ça, un projet qu’on se donne, des défis qu’on s’impose, comme des jalons qu’on aimerait poser au cours de son œuvre, du début, pour lui donner une cohérence après coup. Mais ça tombe à l’eau. En tous cas pour moi. Pas la peine d’essayer.

Implique de commencer un texte sans savoir du tout où il va nous mener. Mais sans être guidé par un élément extérieur non plus. Se laisser aller au fil de la plume. Le problème est à la fois dans l’amorce et dans l’abstraction. Deux phénomènes dont l’ouverture doit être méticuleusement dosée, tout en restant totalement spontanée. L’aile d’une mouche, le voyage zigzagant de ce point noir dans l’espace rougeoyant. On ne le suit des yeux qu’à moitié. La trajectoire est suggérée par les mouvements de l’œil, rien de plus. On s’entraîne, on va un peu plus loin. Dans la rue, aux portes de la ville, aux prémisses des grands espaces. On s’écarte encore. Vers où ? et toujours ce diptère terre à terre lapant verset glas. On n’est jamais las d’avancer, Hugo vous le dira. On avance. On va de l’avant. Toujours. On s’épuise. On s’amenuise, on contemple. On constate changements et perturbations. Progrès et obscurantismes rampants. Pas d’ennui. Meure. Peine harassante dont on ne se débarrasse pas, dont on n’arrivera pas à se débarrasser. Le petit point noir valse encore que l’on fait à notre tour valser sur la page. Pas plus de rimes et raisons sur cette page qu’ailleurs dans le mouvement du diptère qui erre sans faire. Vouloir croire ? Pourquoi ? Pour le sens justement. Pour trouver. C’est dangereux. Ne plus vouloir croire. Mais pas vouloir ne pas croire. Vouloir croire quand même, dans un certain sens. Croire en moi, croire en ce qui pourra, ce que je pourrai. Croire en moi, croire en toi, mais pas en lui. Croire pour mettre un sens, un désir dans le regard. Croire pour se croire, pour croire en soi. Arrêter ce texte qui s’enferre dans une impasse. Ras-le-bol. Revenons au point noir, au point de voltige en l’air par terre. Avancer. Avancer dans la neige que l’on nuit pour ce soir. Jusqu’au point. Noir.

Prolongerait l’Ouverture...

Le dernier paragraphe est repris dans Langues Oubliées



Dernier ajout : 17 mars. | SPIP

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