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Mercredi 10 juin

10 juin 2020

Voici demain…

Et oui, voici demain, justement. Fallait bien qu’il arrive, celui-là. Il prend son temps, mais le voilà, sans faute, ponctuel, 24h après son prédécesseur. Rien ne sert de courir, il faut partir à point, comme me le répète sans cesse mon fils aîné, lorsqu’il me défie à la course.
Au passage, je commence, à l’instar de l’ennemi Desproges, à maudire La Fontaine, le fabuleux fabuliste. Ras-le-bol de ses morales insipides et paternalistes, sentencieuses et moralisatrices (bonjour, Monsieur de la Palice). Cigales, fourmis, lièvres, tortues, s’immiscent dans mon intimité sans que je leur aie rien demandé, et ça commence à bien faire : ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés — mais s’ils pouvaient au moins garder leurs distances. Avec moi du moins.
Toujours est-il que le lendemain que nous attendions hier en chantant à propos d’pieds est arrivé par la Lorraine avec ses gros sabots. Et c’est plus qu’on puisse en dire du jour d’après qui, malgré sa grande proximité sémantique avec demain, n’a pas l’air près d’advenir.
La question, sur toutes les bouches aujourd’hui, c’est : de quoi sera fait le jour d’après.
Mais une question plus cruciale encore est : quand ?
Je soupçonne là qu’une forme de procrastination est à l’œuvre, à l’échelle de l’humanité toute entière, à l’échelle de la planète. Au reste, ce ne sera pas la première fois que l’humanité se vautre dans la procrastination, au détriment de son bien-être. En vrac : le Déluge, les dix plaies d’Égypte, l’esclavage, les États Généraux, Munich (et hop ! un bon point Godwin !), la destruction des camps pendant la guerre (et hop ! un deuxième bon point Godwin), la décolonisation, la transition écologique, les violences policières…
Si, à l’échelle de l’individu, et à la condition qu’elle soit exploitée à bon escient, la procrastination peut être un véritable atout, n’a-t-on pas appris depuis tout ce temps que certains problèmes méritent d’être réglés au plus vite, au risque de pourrir jusqu’aux fondations de nos sociétés ?
Au reste, les lendemains qui chantent ne sont jamais réellement venus. Non plus que le temps des cerises ou le Messie, d’ailleurs.
On parle souvent des zélotes écologistes. On compare ces militants radicaux à des extrémistes religieux, et il n’y a pas que du faux là-dedans. Mais là où les écolos, poils au dos, se rapprochent le plus des zélotes, poils aux bottes, c’est dans cette foi qui les anime qu’un jour — un jour ! — une nouvelle ère s’ouvrira : que ce soit l’apocalypse, le règne de Dieu, ou un mode de vie plus en harmonie avec la nature.
Une différence, notable, réside dans le fait que ce mode de vie est accessible. La question du quand, en revanche, est presque aussi hypothétique.
Quand est ce point, où il nous faudra partir, pour nous éviter de courir à perdre haleine ?
J’entends déjà la réponse...



Dernier ajout : 17 mars. | SPIP

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