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22 avril 2007

31 mai 2008

Journée d’élection présidentielle

Avec du soleil dans les ruelles, des celsius sur les avenues et des mini-jupes aux terrasses des cafés. Cet après-midi dominical a un fort avant-goût estival et toute la population du bar s’est ramassée sur les deux rangées de table sur la rue. L’auvent est à moitié élevé, laissant le chaud soleil inonder les bras et les jambes nues, venant justifier les paires de lunettes hors de prix que l’on montre, sans souci pour ses yeux. Tenues décontractées ou semi-décontractées — on n’oublie rien de la mode et, malgré la marque des lunettes, on n’hésite pas à exposer cette partie de sa garde robe qu’on réserve généralement aux estivants chanceux (ceux qui ont la chance d’être sur le même lieu de villégiature). Je dois être l’un des seuls clients à avoir commandé un café. J’en vois seulement deux autres, deux jeunes filles (une brune et une blonde cendrée) qui n’ont pas eu d’autre idée, surprises sans doute par la rapidité à laquelle on est venu prendre leur commande. Elles sont plongées dans une conversation et rient beaucoup, ce qui explique peut-être aussi leur originalité. Leurs éclats de rire s’élève par moments, bref flux et reflux sonore couvrant le brouhaha, éclats cristallins de jeunesse et d’insouciance éphémère.

Celle qui rit le plus, la brune, et qui me fait face, est habillée sobrement : un marcel blanc, un pantalon sombre, de toile légère (avec des poches sur les cuisses) et qu’elle a peut-être remonté jusqu’au dessous des genoux. Elle a un serre-tête qui, paradoxalement, lui donne un air de petite fille, mais pas trop de bourgeoise — peut-être parce qu’il est contredit par la poitrine, alourdie par la chaleur, que l’on distingue à travers le tissu, sans soutien-gorge. Faisant pendant à ses ongles manucurés, des chaussures à talon, noires, très ouvertes, très printanières , ajoutent encore au tableau une touche fashion (for a lack of a better word).

Quelques couples sont entrés pendant que je travaillais ma description, dont un couple sans doute espagnol à ce que j’entends.

Les deux filles au café s’apprêtent à payer.

Un autre couple trouve enfin une table en terrasse, sous le chauffage inutile.

Le type à ma gauche (la cinquantaine bien tapée) vient de terminer une énorme salade. Il a un petit sac en plastique posé à côté de lui, avec deux livres (dont un sur Klein et ses monochromes, je n’arrive pas à voir l’autre), des crayons, des stylos, des lunettes.

Les deux filles à café se sont levées enfin, me permettant de compléter la description de la brune : elle n’a qu’un petit short s’arrêtant à mi-cuisses, duquel dépasse un long collant soulignant la finesse de ses jambes comme pour mieux faire admirer la forme de son pied et la qualité de ses chaussures. Elles sont jeunes, manifestement entre 20 et 22 ans.

La mode pour les filles cette année est décidément au marcel (et non au débardeur), comme on peut le voir en terrasse. Les bretelles sont souvent cintrées vers l’intérieur, révélant à qui veut les voir celles du soutien-gorge, dont on devine aussi parfois le ruban de tour de poitrine.

Un type d’âge mûr, une bière entamée devant lui, lit le Parisien. Mon voisin boit du café à présent.

Dans le bar lui-même (hors terrasse) à 17 h 31, trois personnes fument et quatre autres (moi compris) sont sans doute des fumeurs.

Discussion patron/barman derrière le bar. Un type au comptoir, un crayon à la main, sirote après avoir payé son verre. Peut-être fait-il des mots fléchés ou des Sudokus. Le barman se pince le nez, signe d’une fatigue physique et nerveuse évidente. Quatre personnes se tiennent le menton, une s’appuie la joue sur sa paume. On croise les bras, on décroise les jambes, on réajuste sa position et sa mise, on sort son argent ou ses cigarettes. Aucun ne téléphone. Je viens de me lever pour aller aux toilettes. Des choses passionnantes se passent en terrasse. Dommage que je n’y sois pas et dommage aussi que je m’apprête à payer, épuisé, et à rentrer chez moi pour me reposer avant la soirée élection.



Dernier ajout : 20 mars. | SPIP

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